maybe i'll burn a little brighter tonight
------------Elle a ce regard vide, celui perdu devant une pile de bouquins encore non lus qui ornent son bureau en bois. Elle n’a pas la tête à ça, Becca. Car elle ne fait que d’y penser depuis des jours. Elle n’a plus eu de ses nouvelles, depuis cette fameuse après-midi sur la plage. La vérité avait éclaté, tout comme son coeur. Becca avait besoin d’en parler, de se confier. C’est pour cette raison qu’elle n’avait hésité à contacter Nash, son ami de longue date. Elle savait qu’avec lui, elle pouvait être parfaitement transparente, qu’il ne la jugerait pas. Elle soupire longuement, se levant de son lit où elle était assise il y a encore quelques secondes. Elle lui avait dit qu’elle passerait dans la soirée, espérant bien la passer avec lui ou du moins, une bonne partie. Comme à son habitude, Becca prend une bouteille de vin rouge. Et c’est le coeur lourd et l’esprit encombré qu’elle se dirige vers Brighton East Side, là où réside Nash. Il ne lui faut que quelques minutes pour se retrouver devant sa porte. Toc toc. Deux coups. Deux simples coups. Elle se devait de ne pas faiblir, Becca. Quand bien même les larmes lui montaient les yeux, car elle avait besoin de se vider, de se lâcher, de dire tout ce qu’elle a sur le coeur concernant cette histoire d’amour. Une histoire d’amour sans doute à sens unique. Elle ne sait pas Becca. Elle ne sait plus. Elle est perdue. Et elle comptait sur Nash pour la guider, même si elle savait, au fond, qu’il lui dirait que déposer les armes et de couper tout contact avec cet homme marié.

Couper les ponts avec Ariadne avait laissé un grand vide dans la vie de Nash : depuis aussi longtemps qu’il se souvenait, elle avait toujours été dans sa vie, d’une façon ou d’une autre.  Mais ses récentes frasques, et son attitude déplacée face et, surtout, envers Lula avait brisé cette belle confiance qu’il lui avait toujours accordé, aveuglément. Sa jalousie et sa possessivité était en train de ternir leur amitié, et c’est le cœur lourd qu’il préféra couper les ponts avec la jeune femme. Du moins, jusqu’à ce qu’elle soit prête à s’excuser de sa conduite et à faire les efforts nécessaires pour accepter que sa petite amie était bel et bien là pour rester dans sa vie. Ce fut probablement l’une des choses les plus difficiles qu’il eut à faire des dernières années, et heureusement, il put compter sur l’oreille attentive de Becca pour l’aider à prendre la bonne décision. Becca qui avait, presque naturellement, prit la place laissée vacante par la précédente occupante au titre de meilleure amie. Becca qui avait toujours été dans l’ombre d’Ariadne, et qui désormais le prouvait à quel point il pouvait compter sur elle. Aujourd’hui, seulement, les rôles semblaient s’inverser, et les textos que Nash avaient reçus, plus tôt ce jour-là, laissait sous-entendre quelques problèmes dans la vie sentimentale de son amie. Ils avaient prévus de se voir, ce soir-là, et il attendait son arrivée en passant en revue les nombreuses chaines disponibles sur le câble. Daisy s’était enfermée dans sa chambre pour étudier, la fin d’année approchant à grand pas, ils seraient donc tranquilles pour discuter. Deux coups furent frapper à la porte, et délaissant la manette de télévision, le jeune homme se dirigea vers la porte d’entrée pour ouvrir la voie à sa visiteuse. Rien qu’à voir sa regard éteint et ses yeux rougis, il comprit que quelque chose n’allait pas. Sans même dire un mot, il fit ce qui lui semblait le plus logique dans ce genre de situation : il ouvrit les bras afin d’y cueillir la jeune femme qui ne cherchait qu’un refuge pour se cacher.

Elle ne dut pas attendre longtemps avant de voir la porte s’ouvrir sur un Nash des plus naturels. Rien qu’en le voyant, il réussit à lui arracher un sourire, ce qui était plutôt rare ces derniers jours. Car Becca, avec son coeur brisé, n’avait plus réellement envie de sourire. Elle n’avait plus envie de rien, à vrai dire. Pourtant elle avait eu la force de sortir de chez elle, et de se rendre chez Nash. Car Becca savait que lui, il serait là pour elle. Elle ne put s’empêcher de retenir plus longtemps ses larmes quand Nash, après un seul regard vers lui, lui ouvrir ses bras. Et c’est volontairement qu’elle se réfugia dans ceux-ci, sa bouteille de vin toujours tenue par sa main gauche, et ce, fermement. Il serait dommage de la laisser éclater sur le sol. Elle laissa couler quelques larmes, ne voulant pas non plus inonder l’épaule de son ami. Becca finit par se reculer légèrement avant d’entrer réellement dans cet appartement qu’elle connaissait bien et qu’elle avait pris l’habitude de squoitter depuis le retour du Kershaw à Brighton. — J’espère que je ne te dérange pas. Daisy est là ? Et excuse-moi d’arriver dans cet état. Becca fit comme chez elle, retirant sa longue veste et déposant la bouteille de vin sur la table. — Je ne suis pas venue les mains vides. Elle lui adressa un léger sourire, essayant pendant quelques secondes de penser à autre chose que le pourquoi de sa venue. Mais Nash n’allait pas la laisser s’en tirer de cette façon, elle le connaissait que trop bien pour ça. Elle déposa sa veste sur une chaise libre, se retournant ensuite vers lui, faisant comme si de rien n'était.

Nash savait que sa bonne amie ne venait pas à sa rencontre que pour passer un bon moment en sa compagnie. Les derniers messages textes échangés étaient révélateurs, et la mine abattue de Becca, le visage même sur lequel elle tentait d’afficher un sourire convaincant, alors qu’il lui ouvrait la porte de son appartement, ne vint que confirmer ses propres soupçons.  Il lui offrit momentanément ses bras en guise de réconfort, et elle n’hésita pas à s’y abandonner, laissant quelques larmes coulées le long de ses joues et sur son t-shirt, mais il ne risquait pas de lui en tenir rigueur pour si peu. Lorsqu’elle se décala, il lui céda le passage afin qu’elle pénètre à l’intérieur, et il referma la porte derrière elle.  Ce logement, elle le connaissait presque par cœur, vu ses très nombreuses visites au cours des dernières années. Elle le connaissait presque autant que les habitants qui y résidaient. – Je crois qu’elle passe la soirée avec une copine. Elle rentrera surement plus tard, à moins qu’elle ne décide de dormir là-bas. – lui rétorqua-t-il en haussant les réponses, répondant à son interrogation au sujet de l'absence de sa nièce dans les parages. Daisy n’était plus une gamine, et Nash lui faisait suffisamment confiance afin de ne pas avoir à monitorer chacun de ses faits et gestes. Et puis, en cas de problème ou d’inquiétude, il pouvait toujours lui téléphoner. Peu à peu, il apprenait à lâcher prise, une épreuve que devait traverser n’importe quel parent face au cheminement de ses enfants. À la différence que, pour Nash, il ne s’agissait pas de sa fille, mais de sa filleule. – Tu sais que tu ne me déranges jamais, voyons. – S’il lui avait ouvert, c’est qu’il était disposé à la recevoir. Avisant la bouteille de vin qu’elle tenait entre les mains, l’homme de la maison se dirigea vers la cuisine afin de sortir deux coupes et un ouvre-bouteille, qu’il vint déposer sur la table, prêts à être utiliser. – C’est bien pour ça que j’apprécie tant tes visites ! – la taquina-t-il, alléguant qu’il n’acceptait sa venue chez lui que parce qu’elle fournissait le vin ou tout autre consommation. À nouveau, le sourire sur son visage lui sembla bien fade, en comparaison à ceux qu’elle avait l’habitude de lui destiner. – Becca. – Il prononça son nom avec douceur, cherchant à attirer son attention, elle dont le regard se détournait, le fuyant visiblement. Déposant sa veste sur le dossier de l’une des chaises, elle se tourna enfin vers lui. – Qu’est-ce qui se passe? Il y a quelque chose qui te chagrine, je peux le lire dans les traits de ton visage. – Sa mine sombre et son regard éteint dépeignait tristement son état d’esprit. Même ses sourires ne parvenaient pas à la leurrer.