Ce n'était pas une nouveauté, Johan ne se plaisait pas au lycée, et pour cause, à cause de ce qu'il appelait son handicap, soit le fait qu'il soit surdoué, il était la proie des plus âgés. Il allait donc à l'école tous les matins avec la peur au ventre et constamment sur la défensive.

Aujourd'hui, les cours qu'il avait n'étaient pas des plus intéressants, mais tant que ce n'était pas du sport, ça lui convenait. Assis au fond de la classe, collé contre la fenêtre donnant sur l'extérieur, une sonnerie brusque le sortit de ses pensées. L'alarme incendie. Il n'était pas très serein mais tenta de masquer sa peur.

Tandis que le professeur sortit en premier lieu pour guider les étudiants, Johan faisait partie des derniers avec plusieurs de ses camarades. Et être seul avec eux leur offrait une opportunité idéale pour faire de lui leur proie.

Malgré le fait qu'il finit tout de même par rejoindre ses camarades à l'endroit prévu, il arriva le nez en sang et en boitant légèrement. Il se demandait encore pourquoi il venait en cours. Le professeur remarqua son état et appela les pompiers immédiatement, ne souhaitant pas être accusé d'une quelconque non assistance par la suite. Il resta assis dans un coin en attendant, les pensées qui vagabondent et l'envie d'ailleurs, l'envie de calme et de sérénité.

Johan avait toujours la boule au ventre lorsqu'il s'agissait de se rendre au lycée. Tous les matins sont une torture pour l'adolescent qui voudrait tout simplement être ailleurs, avoir une autre vie. Mais cette routine dans laquelle il vivait allait le tuer à petit feu, il le savait, mais il continuait à se rendre en cours, parce qu'il le devait tout simplement.

Cette journée ne changeait pas grand chose à toutes les autres qui s'étaient déjà écoulées. Des camarades lui lançant des piques dès qu'il passe près de leur petit groupe, un casier dans lequel il a déjà trouvé une souris morte, ce qui était censé être drôle ne l'était pas du tout aux yeux du jeune garçon. Et puis, il y avait des critiques sans cesse, le fait qu'il soit différent. Et moins il répondait plus il mettait en colère les plus vieux. C'est toujours comme ça que ça commençait.

Une alarme retentit, le sortant de ses pensées. Est-ce que c'était un simple entraînement comme bien des fois ou alors cette fois-ci, c'était bien réel ? Si c'était le cas, le jeune anglais aurait aimé se glisser directement dans les flammes. La souffrance qu'il gardait en lui depuis trop longtemps bouffait son adolescence. Il était à bout, mais ça personne ne le voyait, parce que tout le monde le voyait comme un gamin froid et distant.

Des coups, un trou noir puis, de nouveau une lumière. Il était parmi les autres étudiants, le visage ensanglanté, et il réfléchissait déjà à l'excuse qu'il allait pouvoir sortir à l'infirmière quand elle verrait son état. Il vivait ainsi, un mensonge, puis un autre, il n'y avait que ça qui fonctionnait. Johan n'arrivait tout simplement pas à dire ce qui se passait vraiment, et puis de toute façon, qui allait le croire ? Personne. Il savait l'image qu'avait ses professeurs, et il faisait aussi tout pour garder cette image qu'on se faisait de lui.

Assis contre le mur, une jeune femme vient soudain à sa rencontre. Il faut croire qu'on avait appelé les pompiers, pour si peu ? Il n'était pas à l'article de la mort quand même. Il avait mal oui, mais il n'était pas du genre à pleurer dès que ça n'allait pas. Il avait appris à s'endurcir.

" - Johan."

Lui aussi avait l'impression d'étouffer, de sentir une masse l'envelopper petit à petit, comme si la mort avait décidé de le prendre ici et maintenant. Mais il entendit de nouveau la voix de la jeune femme, comme s'il était présent mais que son esprit était déjà ailleurs.

" - C'est rien, je me suis juste pris une porte en voulant me dépêcher. Je vais bien."

Il voulait crier qu'il n'allait pas bien, qu'il avait mal, autant physiquement que psychologiquement, pourtant rien ne sortait. Il était comme détaché de tout ce qui se passait devant lui. Comme s'il était lui-même spectateur de cette scène. Mais les portables qui étaient autour de lui ne pouvaient le trahir, ça sera encore pire après.