when i'm alone, i'd rather be with you / @jahquil tyler

j’dis que c’est ma musique, mais ça l’est pas vraiment.
j’dis que c’est mon mec, mais ça l’est pas vraiment. il fait bien semblant jahquil, j’pourrais y croire. mais il se casse trop vite. c’est comme une putain de grande roue, on redescend très vite, insatisfaits. en tout cas moi ça me les brise d’le voir débarquer comme un empereur. parce qu’il fait perdre le sens aux idées. l’image aux couleurs. parce qu’il suffit qu’il demande. qu’il touche. pour que j’sois en chien. le numéro habituel sur le même refrain. et puis, il y a soudainement plus de freins. il y en a peu, déjà, quand je commence à fixer le sol, à fixer le plafond, à fixer les silhouettes qui se tordent sous le criard et le flamboyant. j’le vois pas, j’vois ce qui doit sûrement lui faire office de potes à la fac. j’sais pas, j’ai jamais mis un pied là-dedans. sûrement que j’suis trop intelligent ou trop con.
comme il y a foule j’fais ce que j’peux. je brasse l’air de mes deux bras. alors, forcément, y a des coups qui partent dans la précipitation. parce que c’est pas récurrent, ni obligé. c’est pas marqué par st. thomas dans l'évangile qu’il débarque, angélique; on sait bien qu’il ne l’est pas jahquil. et c’est pas grave. c’est pas grave si j’me sens bien quand il est là. mieux que d’habitude, tranquille. pas besoin de forcer le trait couillon de service. non, quand c’est fini, je reste le plouc que j’ai toujours été. celui qui est bien, mais pas suffisamment bien. il y a trop de mecs, et moi j’suis tout seul. c’est bon, je l’ai. on va faire comme si j’en crevais pas d’envie et recommander une bière. compléter le vide. parce que c’est ma putain de chanson. je colle mon front au sien. « t’as mis le temps bordel. » petite claque sur la joue, qui badine, qui garde un semblant de dignité. sexfriend, ça veut dire que dalle. est-ce qu’on a jamais trouvé ce mot dans un dictionnaire? ou un truc équivalent? sexfriend, ça veut surtout dire remplaçable. ça veut dire j’me casse quand j’veux. rien à foutre. en théorie, c’était pas dérangeant. en théorie c’était plutôt sympa. parce que jahquil est sympa. il a ce sourire ravage qui donne envie d’le cogner et d’embraser les cieux. et ça, tout ce merdier tout autour, c’est pas juste. « heureusement que t’es pas mon mec. » malheureusement.

C’est vendredi et comme presque tous les vendredis, tes amis les avocats en herbe et toi-même avez décidé de vous rendre au Concorde 2. Comme toutes les fins de semaine, vous allez boire pour oublier le merdier dans lequel vous vous êtes fourrés et vous déhanchez comme si plus rien n’avait d’importance. C’est peut-être ça la solution. Se foutre royalement de tout et vivre comme si c’était son dernier jour sur Terre. Vous vous rapprochez du bar, prêt à vous saoulez comme jamais. Vous ressemblez à une meute de loups affamés partant à la chasse. Faut dire qu’à la fac, avec ce groupe de travail qui vous lie, vous ne vous déplacez plus qu’en meute. Tu commandes une bière au barman qui est plutôt mignon et lui fais un clin d’oeil. À croire qu’il te les faut tous et que tu n’es jamais rassasié. Tu n’aimes pas t’attacher, tu finis toujours par souffrir. Alors, tu passes de lit en lit et au petit matin, tu pars sur la pointe des pieds sans laisser de traces. Pourtant, y en a bien un qui chamboule tout, qui change les règles du jeu, c’est Ste. Il te met l’eau à la bouche sans aller plus loin et pourtant, t’es déjà un peu accroc. T’es perdu, t’as jamais ressenti ça avant et t’es terrorisé à l’idée de pouvoir vraiment aimer quelqu’un. T’attends ta commande, le coude sur le comptoir et t’observe l’arrivage du soir. Y a les habitués, ces têtes que tu croises tout le temps, les minots dont c’est la première fois en boite, les dragueurs invétérés, les observateurs juchés sur les canapés et… Rienzi, qui a l’air aussi à l’aise qu’un pingouin en pleine jungle. T’essaies d’éviter son regard mais trop tard, il t’as repéré et fonce droit dans ta direction. Tu l’aimes bien Rienzi, surtout tard le soir sous les draps. Seulement, malgré les règles que vous vous êtes fixés, t’as l’impression que pour lui, cela va au-delà de vos parties de jambes en l’air. Toi, tu voudrais pas qu’il y ai de sentiments entre-vous, ça viendrait tout compliquer. Et toi, les complications, t’essaie tant bien que mal de les éviter. Il est à moins d’un mètre de toi et des potes d’universités se saisissent de leurs consommations et vous laissent seuls en tête-à-tête. « t’as mis le temps bordel. » Tu le laisses coller son front au tien, s’amuser un peu. Tu esquisses un sourire. « heureusement que t’es pas mon mec. » Tu lèves les yeux au ciel avant de dire, taquin : « bah oui, heureusement, manquerait plus que ça. » Tu l’aimes vraiment bien Rienzi, mais comme un ami avec lequel tu passes du bon temps, rien de plus. Tu crains que son côté il n’y ai plus et que tu sois obligé de briser son petit coeur, et ça tu veux pas.